<b><a href="http://www.domainesinfo.fr/chronique/385/emmanuel-gillet-nouvelles-extensions-les-procedures-d-opposition-partie-1.php">http://www.domainesinfo.fr/chronique/385/emmanuel-gillet-nouvelles-extensions-les-procedures-d-opposition-partie-1.php</a><br>
<br>Par Emmanuel GILLET</b><br><a href="mailto:emmanuelgillet@yahoo.fr" class="txtNoir11s">emmanuelgillet@yahoo.fr</a><br><br>
                                                                        <b>Le lancement des nouvelles extensions Internet
personnalisées est accompagné de plusieurs procédures dites
d’opposition. Quelles sont-elles ? Comment les utiliser ? A quelle fin ?
Cette semaine DomainesInfo vous en présente les caractéristiques
générales. Leurs spécificités seront développées dans les prochaines
chroniques.</b>
<br>
<br>Dans le cadre de la libéralisation des extensions (ou <i>generic Top Level Domain</i>,
gTLDs), l’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN) a
élaboré un système de règlement des litiges qui, outre son caractère
inédit – comme le fut celui de l’Uniform Domain Name Dispute Resolution
Policy (UDRP), en son temps –, se distingue par son ampleur et
l’apparente complexité qui en résulte.
<br>
<br>Le guide du candidat (<i>Applicant Guidebook</i>), c’est-à-dire le
document qui expose les principes et les règles applicables à
l’attribution des nouvelles extensions (ou nouveaux gTLDs), prévoit,
dans son Module 3 "Procédures d’opposition" (Objection Procedures), une
série de procédures mises à la disposition des tiers qui souhaiteraient
formuler une demande d’opposition (<i>Obection</i>) contre la demande de
création d’une nouvelle extension. La libéralisation des extensions
attirant diverses catégories de tiers pour différentes raisons, l’ICANN a
décidé d’adopter plusieurs procédures et d’en déléguer l’administration
à des institutions de règlement des litiges renommées.
<br>
<br>Ainsi, <b>on distingue quatre procédures</b> :
<br><table bgcolor="#FFFFFF" border="0" cellpadding="0" cellspacing="0" width="100%"><tbody><tr><td width="15"><br></td><td class="txtNoirGeorgia12" style="line-height:18px" valign="top" width="411"><li><u><i>String Confusion Objection (SCO)</i></u> : procédure mise à
la disposition des postulants et des registres administrant des
extensions (TLDs) existantes afin de contester le dépôt d’une nouvelle
extension susceptible de créer un risque de confusion ;
<br></li><li><u><i>Legal Rights Objection (LRO)</i></u> : procédure
élaborée pour permettre aux tiers titulaires d’un droit de marque de
s’opposer à la création d’une nouvelle extension lorsque celle-ci porte
atteinte audit droit de marque ;
<br></li><li><u><i>Limited Public Interest Objection (LPIO)</i></u> :
procédure pouvant être déclenchée par toute personne estimant que la
création d’une extension serait contraire à la morale, aux principes
généraux du droit international ou à l’ordre public ;
<br></li><li><u><i>Community Objection (CO)</i></u> : cette procédure
s'applique lorsqu'il existe une forte opposition de la part d'une
communauté à l'égard de la création d'une nouvelle extension.</li>
<br>Nous dirons, ici, un mot de l'origine et de la nature des procédures
d’opposition (I) avant d'en exposer les règles et principes communs
(II).
<br>
<br><font color="#02A8C2" face="verdana"><b>1. ORIGINE CONTRACTUELLE DES PROCEDURES</b></font>
<br>
<br>Les procédures d’opposition aux nouvelles extensions génériques
(nouveaux gTLDs) puisent leur source dans l’ensemble des documents
élaborés par l’ICANN pour exposer les conditions d’obtention auxquelles
le postulant à une extension adhère lorsqu’il livre son dossier de
candidature. Il se forme alors un contrat entre l’ICANN et le postulant.
Parmi ces documents contractuels, il en est un nommé "New gTLD Dispute
Resolution Procedure" (New gTLD DRP). Son objet est de proposer des
mécanismes de règlement des litiges qui se déroulent exclusivement en
dehors des juridictions étatiques.
<br>
<br>En termes de technique contractuelle, le mécanisme se rapproche de
celui de l’UDRP : en adhérant au contrat élaboré par l’ICANN, le
postulant émet une offre de règlement des litiges envers les tiers
intéressés et s’oblige à se soumettre aux procédures prévues par le
contrat.
<br>
<br><font color="#02A8C2" face="verdana"><b>2. REGLES ET PRINCIPES COMMUNS A L’ENSEMBLE DES PROCEDURES</b></font>
<br>
<br>Le système issu de la New gTLD Dispute Resolution Procedure (New
gTLD DRP) repose sur des principes communs (2.1.) et des règles de
procédure communes (2.2.).
<br>
<br><font color="#02A8C2" face="verdana"><b>2.1. Principes communs </b></font>
<br>
<br>Nous en mentionnerons trois : la spécificité et l’autonomie des
procédures (2.1.1.) ; leur transparence (2.1.2.) ; l’indépendance et
l’impartialité des experts (2.1.3.).
<br>
<br><b>2.1.1. Spécificité et autonomie des procédures </b>
<br>
<br>Le principe le plus innovant et le plus remarquable est sans doute
celui de la spécificité et de l’autonomie des procédures. Forte de son
expérience, l’ICANN est désormais consciente de la diversité des
intérêts légitimes que différentes catégories de personnes peuvent
exprimer et revendiquer en matière de nommage. Elle a donc jugé utile de
mettre à leur disposition ces quatre procédures, chacune adaptée à
l’objet de la discorde et aux besoins des parties.
<br>
<br>Les quatre procédures sont parfaitement autonomes : il ne sera donc
pas possible de formuler une seule et même opposition, pour des motifs
différents, et à des institutions différentes. Les procédures sont
distinctes et "hermétiques" : elles ne se confondent pas et ne
s’imbriquent pas entre elles. Ainsi, si une personne entend soulever une
opposition à la fois dans le cadre de la Limited Public Interest
Objection (LPIO) et dans celui de la Community Objection (CO), elle
devra formuler deux oppositions distinctes (Art. 7(d).
<br>
<br>Précisons également qu’à chaque procédure correspond une institution de règlement des litiges (<i>Dispute Resolution Service Provider, DRSP</i>)
qui a été dûment désignée par l’ICANN. Un dossier d’opposition adressé à
une institution qui n’a pas été désignée par l’ICANN pour traiter le
type d’opposition soulevé serait irrecevable.
<br>
<br>Enfin, si le règlement de la New gTLD Dispute Resolution Procedure
(New gTLD DRP) présente des stipulations d’ordre procédural, il faut
préciser que chaque institution de règlement des litiges (DRSP) adopte
des règles supplémentaires (<i>DRSP Rules</i>).
<br>
<br><b>2.1.2. Transparence des procédures</b>
<br>
<br>La transparence est un principe cher à l’ICANN. Ses décisions ayant
fréquemment trait à l’intérêt général, il n’est pas surprenant qu’elle
ait fait choix de la transparence dans le cadre des procédures de
règlement des litiges relatifs aux extensions génériques (gTLDs).
L’article 10 de la New gTLD Dispute Resolution Procedure (New gTLD DRP)
prévoit ainsi que chaque opposition – dès lors qu’elle aura été formulée
conformément aux exigences – fera l’objet d’une publicité sur le site
de l’ICANN et/ou sur le site de l’institution de règlement compétente.
<br>
<br>Toutefois, le principe de transparence ne s’étend pas aux
informations confidentielles susceptibles d’être échangées lors de la
procédure. Il appartiendra alors aux parties d’exiger que tels documents
demeurent dans la confidentialité des débats.
<br>
<br><b>2.1.3. Indépendance et impartialité des experts </b>
<br>
<br>L’indépendance et l’impartialité est un principe qui relève de
l’ordre public international. Son impérativité est inscrite dans
l’article 13(c) de la New gTLD Dispute Resolution Procedure (New gTLD
DRP), lequel précise que chaque institution de règlement des litiges
(Dispute résolution service provider, DRSP) devra mettre en œuvre les
moyens d’assurer l’indépendance et l’impartialité des experts à
l’occasion de leur décision et durant toute la durée de la procédure.
<br>
<br><font color="#02A8C2" face="verdana"><b>2.2. Règles communes </b></font>
<br>
<br>D’un point de vue strictement procédural, les quatre procédures ont un grand nombre de règles en commun.
<br>
<br><b>2.2.1. Disponibilité des procédures </b>
<br>
<br>S’agissant de la disponibilité des procédures d’opposition,
l’article 7(a) New gTLD Dispute Resolution Procedure (New gTLD DRP) se
contente d’indiquer que ces oppositions devront être formulées avant la
date de clôture de dépôts des oppositions.
<br>
<br><b>2.2.2. Langue des procédures</b>
<br>
<br>Il a paru utile à l’ICANN d’imposer une seule langue pour l’ensemble
des procédures. Le caractère international de la libéralisation des
extensions génériques (gTLDs) l’invitait, dans un souci de simplicité, à
ne choisir que l’anglais, ce qui est fait à l’article 5 de la New gTLD
Dispute Resolution Procedure (New gTLD DRP).
<br>
<br>Contrairement à ce qui existe en matière d’UDRP, cet article 5 ne
prévoit aucune exception. On le regrette car il est des hypothèses où
les parties en opposition pourraient partager une langue commune, autre
que l’anglais. Il eut été préférable, dans ce cas, de laisser le dernier
mot au panel d’expert, mais, dans une telle hypothèse, nous ne doutons
pas que ce dernier n’hésitera pas à prendre cette liberté.
<br>
<br><b>2.2.3. Déroulement des procédures</b>
<br>
<br><li><b>Chronologie</b> : Le déroulement de la procédure est assez
classique. Au dépôt d’une objection succède un examen de sa recevabilité
visant notamment à vérifier la complétude de l’opposition et la
compétence de l’institution de règlement des litiges (Dispute résolution
service provider, DRSP) saisie. Cet examen accompli, l’existence de
l’opposition est révélée au public. Le postulant (défendeur dans la
procédure) dispose d’un délai de 30 jours pour répondre à la demande
d’opposition à compter de sa transmission par le DRSP. La réception de
la réponse par celle-ci fait courir un nouveau délai de 30 jours à
l’issue duquel l’expert doit être désigné ou le panel d’experts,
constitué. Il appartiendra aux experts d’autoriser ou non les parties à
formuler des arguments supplémentaires ; le cas échéant, elles devront
les faire dans un délai de deux mois. Quant à l’avis (<i>expertise determination</i>),
il doit être émis dans le délai de 45 jours suivant la désignation de
l’expert unique ou la constitution du panel d’experts ; il ne s’agit que
d’une obligation de moyens.
<br>
<br></li><li><b>Forme électronique (<i>Online Dispute Resolution</i>)</b>
: Les procédures se déroulent uniquement sous forme électronique (art.
6). La seule entorse à cette règle est prévue à l’article 21(f) qui
prévoit la signature de l’avis sur un format papier.
<br>
<br></li><li><b>Audiences</b>: En principe, dit l’article 19, il n’est
pas nécessaire d’organiser des audiences. Toutefois, la décision revient
aux experts, en fonction des éléments livrés dans le dossier. S’ils le
jugent utile, des audiences pourront être organisées. Le cas échéant,
les experts décideront également du caractère public ou privé de ces
audiences. On comprend par exemples l’intérêt qu’il peut y avoir à
ouvrir les audiences au public dans les procédures amenées à traiter des
questions d’ordre public et de communauté. En revanche, compte tenu des
intérêts privés en jeu dans d’autres procédures (en matière de marques
notamment), des audiences publiques ne paraissent pas concevables. En
réalité, l’éventualité d’audiences physiques risque de se heurter à
l’impossibilité matérielle de les organiser, compte tenu du délai dans
lequel les experts sont invités à rendre leur avis.
<br>
<br></li><li><b>Négociation et médiation encouragées</b> : La New gTLD
Dispute Resolution Procedure (New gTLD DRP) invite instamment les
parties à tenter de trouver une solution amiable au différend qui les
oppose. L’article 16(a) les encourage à recourir à la négociation et à
la médiation tout en précisant qu’il ne s’agit pas d’une obligation. Le
cas échéant, les institutions de règlement des litiges (DRSP) sont
tenues de mettre un médiateur à la disposition des parties. Il est
important de préciser ici que l’ICANN, dans sa conception de
l’impartialité, n’a pas souhaité donner aux experts la mission de
concilier les parties. Il s’agira donc d’une autre personne. L’article
16(d) prévoit également la suspension de la procédure le temps de la
médiation, de sorte que la procédure pourra être allongée, mais de 30
jours seulement.</li>
<br><b>2.2.4. L’avis</b>
<br>
<br>Avant d’être livré aux parties, l’avis rédigé par les experts devra faire l’objet d’une vérification matérielle (<i>scrutiny</i>) qui n’a pas vocation à modifier la substance de l’avis mais porte seulement sur des corrections de forme.
<br>
<br>Quant à la nature de l’avis, il suffira d’indiquer que les procédures sont expressément qualifiées d’<i>expert determination</i>
(voir spécialement les articles 2(d) et 21 de la New gTLD Dispute
Resolution Procedure (New gTLD DRP), ce qui signifie que les parties ne
sont pas liées par l’acte à intervenir. Néanmoins, le Guidebook précise
au point 3.4.6. du Module 3, intitulé "Expert determination" que l’ICANN
se pliera à l’avis du panel d’experts.
<br>
<br>Il ne s’agit donc pas de procédures arbitrales, de sorte que l’avis à
intervenir i) ne lie pas les parties, ii) ne leur est pas directement
opposable mais iii) il tire sa raison d’être, sa légitimité et sa force
juridique dans le fait que l’ICANN s’engage à le mettre en œuvre. Pour
ces raisons, il eut été préférable d’ajouter cette précision dans la New
gTLD Dispute Resolution Procedure (New gTLD DRP), et non seulement dans
le Guidebook.
<br><br><br>
                                                                                                                                                </td></tr></tbody></table>